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| L'analyse des registres paroissiaux de Arola comme le "Livre des morts" (Libellus Continens Mortuos) du début du XVIIème siècle (1615-1645) ou les testaments de la première moitié du XVIIIème siècle permettent de comprendre comment chacun vivait ce moment décisif, comment chacun préparait sa mort et tentait d'assurer le salut de son âme au paradis. |
| Les actes de décès de Arola 1615-1645 |
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| Les testaments au XVIIIéme siècle |
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Au XVIIIème siècle, l'acte de décès perd sa structure habituelle, notamment les legs faits par le mourant disparaissent; le testament se généralise, soit écrit par le curé de la paroisse ( testament de Angela Ceruetti )
soit plus fréquemment par un notaire ( testament de Don Giulio Ceruetti et prêtre de Arola en 1709) , qui nous servira ici de document de référence. Le testament est un acte à la fois civil et religieux, mais aussi de prévoyance et de prudence car il est, pour les hommes de cette époque, leur dernière chance de gagner leur place au paradis; ils y affirment leur foi et leur amour en Dieu, ils y expliquent l'organisation de leurs funérailles et le lieu de leur sépulture, ils y réclament des prières, y font des aumônes aux pauvres et des donations à l'église. |
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La date ... |
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Dès le début, le testament montre son attachement à l'Eglise, il est toujours daté en référence à "l'année du Seigneur" et à "l'indiction"(1). |
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Puis, le testateur se présente en précisant son nom, sa profession, son domicile et déclare être sain d’esprit, condition indispensable à la
validation du testament. |
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Les formules religieuses ... |
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Cette partie du texte s'ouvre par une formule rituelle : "Au nom du Père, du fils et du Saint-Esprit.
Cette formule rappelle la trinité de Dieu à laquelle le testateur associe la "Glorieuse Vierge Marie", mère du Christ, et les Saints et Saintes du paradis "tutta la Corte del Cielo" ainsi il témoigne son appartenance à la communauté religieuse chrétienne, ce qui explique la présence de cette formule en début du texte." |
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Ensuite, chaque testament se compose d'invocations religieuses se présentant sous la forme, "Je recommande mon âme à Dieu le Père, au Très Haut...". Les gens pensent que pour mériter l'accès au paradis, ils doivent s'adresser en priorité à leur dieu, le juge suprême à l'heure de la mort. Ce Dieu que l'on craint, est aussi perçu comme bon et miséricordieux, capable de pardon et de clémence; c'est la raison pour laquelle les hommes lui recommandent leur âme parce qu'il est le juge divin et que de son seul jugement dépend le devenir de leur âme. |
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Dans la longue série des invocations, la Vierge Marie vient toujours en seconde position, elle représente un des meilleurs moyens d'atteindre le Christ, son fils, et donc Dieu. Après la Vierge Marie viennent les Saints et Saintes. Le culte des saints est l'une des caractéristiques du Christianisme. En 1563, après le Concile de Trente, est publié un décret, par l'intermédiaire de Carlo Borromée, sur "De invocatione, veneratione, et reliquiis sanctorum, et sacris imaginibus"(2), dans lequel l'Eglise réaffirme que le Christ est le seul rédempteur et sauveur, mais également que l'invocation des saints est bonne et utile car ils peuvent demander à Dieu des bienfaits pour les fidèles, ils sont donc des intercesseurs efficaces. Parfois le testateur invoque un saint qui est vénéré comme Saint-Patron, comme protecteur d'une église..... Ici Giulio Ceruetti fait appel à Saint Joseph. |
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Sépulture et funérailles ... |
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Le second sujet d'inquiétude pour les testateurs, après le devenir de leur âme, est le lieu de leur sépulture et l'organisation de leurs funérailles, voici ce que déclare Giulio Ceruetti:
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| Au XVIIIème siècle, l'église étant de plus en plus réservée aux élites en raison des problèmes d'insalubrité causés par l'ouverture des fosses, le cimetière devient peu à peu le lieu d'ensevelissement habituel, il est donc inutile de préciser dans son testament que l'on veut être enterré au cimetière. Seuls ceux qui veulent "éviter le cimetière" (nobles, religieux.. avec l'autorisation des autorités religieuses) prennent soin d'élire leur sépulture à l'église, il s'agit là d'une volonté de se distinguer des catégories plus populaires, mais aussi d'affirmer son rang social. Pour certains, la sépulture à l'église est aussi un moyen de bénéficier plus efficacement de l'intercession des saints, des prières de leur famille et des fidèles de la paroisse. Après le choix du lieu de sépulture, les testateurs s'attachent à organiser leurs funérailles, ici Giulio Ceruetti sera inhumé le lendemain de sa mort, le souci de conserver le corps pendant vingt-quatre heures (parfois quarante-huit heures) avant l'inhumation est lié à la peur d'être enterré vivant. |
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| On remarque ici avec quelle minutie on règle le déroulement de ses funérailles et la présence plus ou moins nombreuse des membres de la procession, le clergé, les Confréries, mais aussi les pauvres, personnages incontournables des funérailles auxquels on fait l'aumône, la dernière action charitable pour le défunt, mais aussi des petits détails concernant la cérémonie comme les cierges dont la flamme est le symbole de la résurection, leur nombre, leur poids car la cire a un coût!! |
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Les demandes de messes post-mortem ... |
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Parmi les signes de religiosité et d’inquiétude face à l’au-delà que l’on trouve dans les testaments, les demandes de messes apparaissent comme "le signe le plus net de la
dévotion", ces messes que le testateur demande sont destinées à faciliter l’accès de son âme au paradis, à diminuer les peines du purgatoire et leur durée, et à faire prier les fidèles pour son repos éternel. Il y a d’abord les services ordinaires qui interviennent à date fixe après la mort : le septième jour, le trentième (ou quarantième) jour, et au bout d’un an (messe anniversaire). Cet échelonnement des messes dans le temps fait référence à un calendrier très ancien et serait lié aux étapes de la décomposition du corps après la mort. |
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Le testateur lègue aussi à la paroisse, à une église soit une terre, soit un capital en espèces, à
charge pour la paroisse ou l'église de faire célébrer à perpétuité les offices et messes demandés les jours qui lui tient à coeur
; un jour anniversaire, les fêtes de la Vierge, celui d'un Saint... |
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Les aumônes et donations pieuses ... |
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Les aumônes et les donations sont des œuvres pieuses recommandées par l'Eglise pour obtenir la rémission de ses péchés et le salut de son âme. Une aumône est un don gratuit d'argent ou de nourriture aux pauvres, tandis qu'une donation est un don à une institution ou un établissement religieux: un couvent, une confrérie ou la Fabrique de l'Eglise. L'aumône sert à aider matériellement les pauvres mais également à profiter de leurs prières, en effet elles sont jugées plus efficaces parce qu'elles émanent d'êtres très humbles, le plus souvent ce sont des dons de pain, de riz ou de sel. |
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| Dans son testament Giulio Ceruetti fait également des donations pieuses à l'Eglise, telles que ces terrains situés " in Versura " et " Rincier " afin que l'usufruit soit distribué par le Curé de la paroisse aux infirmes de la Communauté de Arola et Pianezza. |
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Conclusion ... |
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Le XVII et XVIII ème siècles sont des périodes durant lesquelles la piété des hommes est fortement affirmée et transparaît dans les actes de décès et les testaments
où les formules pieuses et les demandes de messes sont omniprésentes Ainsi les Arolais et toutes les populations de la région de l'époque sont très préocupés du salut de leur âme, ils sont fort nombreux à mettre en œuvre les moyens pour assurer leur salut mais on constate une hiérarchisation sociale dans les attitudes et les moyens mis en oeuvre, ceux qui possèdent le plus ( nobles, religieux, dignitaires) sont ceux qui ont le plus d'exigences pour le devenir de leur corps et leurs funérailles. Plus on descend dans la pyramide sociale, moins il y a de demandes ! Les hommes ne seraient-ils pas égaux face à la mort ? Le salut de l'âme dépendrait-il des moyens financiers de chacun ? |
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(1) Utilisée depuis le Moyen Age, l'indiction est une période de 15 années qui sert à dater des actes ecclésiastiques, par extension les documents juridiques. (2) Décret sur l'invocation, la vénération et les reliques des saints, et sur les images sacrées |
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